Une somme de travail et d´informations comme on n´en a jamais vu ! Fini les bornes kilométriques pifométriques, les goudrons bidons, les bitumes sans volume, les embryons de gravillons, en un mot : les routes dont on doute !
Quelques petites choses sur
LES VRAIES ROUTES (1)
qu´il peut être utile de savoir quand on est modéliste ferroviaire*
* Mais on peut aussi s´en passer. par Gérard Bianchi
La représentation modélistique de voie ferrée est normalisée. Pour la route, si des conseils sont publiés quant à la façon de les reproduire en miniature, les normes restent du domaine de la réalité et les modélistes se débrouillent. Or, si les voies ferrées sont déterminées dès le début, il vaut mieux savoir comment on veut que soient les routes avant de concevoir le détail du décor.
“Je fais un réseau pour mon petit train.
Je veux y mettre une ou plusieurs routes.
Je veux que ma route ait l´air aussi vrai (ou presque) que ma voie ferrée.
Je connais les publications qui parlent des rues et routes dans le modélisme.
Mais, une route, comment ça marche... euh... comment c´est fait, en vrai ?”

Si vous vous dites ça, lisez ce qui suit. C´est pas sorcier.
Préambule. — La réalisation en modélisme n´est pas le sujet ici et il ne s´agit pas d´apprendre à faire une route, mais d´aider les constructeurs de réseaux de petits trains qui ont envie de savoir. Je ne peux parler que des routes françaises, mais les principes de bases sont universels. Restent les équipements dont l´aspect est décidé par les États et donc différents d´un pays à l´autre. Cette remarque est de moins en moins valable avec l´unification européenne, mais il y a un “avant” !
Il ne sera question que du dessus de la route sans s´occuper des techniques de construction.
La date de 1970 qui sert de référence entre l´avant et l´après est approximative et arbitraire mais il y a un virage autour de cette date. Les changements ont été progressifs. Avant 1980, vous pouvez faire cohabiter des choses de l´avant et de l´après. Même en 2007, on circule encore sur des routes dont l´aspect n´a pas changé depuis 1970. Beaucoup de routes d´aujourd´hui sont des modernisations de l´avant, lequel y est encore perceptible.
Petite précision.Les routes sont classées administrativement selon leur propriétaire : nationales, départementales, communales. Plus les autoroutes. Il n´existe pas d´autres catégorie pour le moment.
Elles peuvent être à grande circulation. C´est un classement administratif sans rapport avec la collectivité qui en est propriétaire. Il y a eu des routes secondaires nationales et il y a de plus en plus de routes départementales, voire communales, à grande circulation. La question : “Quelle est la largeur d´une route départementale ?” n´a pas de sens, ce qui ne veut pas dire que ceux qui la posent sont insensés. Je dirais même plus : au contraire.
La décentralisation ayant pour objectif de débarrasser l´État du maximum de ses routes en commençant par les plus petites, les routes secondaires nationales deviennent une denrée rare et les départementales à grande circulation se multiplient. Aujourd´hui, ceux qui prétendraient, comme jadis Jean Yanne, ne jamais aller sur les routes départementales, doivent laisser leur voiture au garage.
Cet article se veut le plus proche possible de la pratique. Ceux qui ont envie d´approfondir la question peuvent le faire ici, grâce à Wikipedia. Il y a probablement des divergences, on ne fait pas un résumé aussi compressé sans casser des oeufs des cailloux. Il y a toujours une différence entre la théorie, quelquefois inapplicable, et la pratique. Enfin, l´objectif de cet article n´est pas de porter la bonne parole officielle, mais d´aider les constructeurs de réseaux de petits trains.
Des choses que tout le monde peut observer ne sont pas dites, mais l´attention est attirée sur certaines au sujet desquelles on dit souvent des inexactitudes. Nous sommes tous des conducteurs routiers. Il y a dans ce qui suit, des considérations qui sont inutiles à la construction d´une maquette et seulement censées faire comprendre. Le texte tente d´utiliser les mots de tout le monde, mais il se peut que des expressions d´initié subsistent sans avoir été décryptées.
Éléments de base. Tracé en plan
Toutes les cotes et distances sont relatives à l´échelle 1/1.
Comme vous ne ferez pas de morceau de route de plus de quelques centaines de mètres, il y a peu de choses à en dire. Évitez les carrefours et les passages à niveau à la sortie d´un virage. Si vous le faites, il faut une signalisation renforcée et en croyant simplifier vous compliquez.
Les tracés réels utilisent des raccordements progressifs (clothoïdes) pour la transition entre les lignes droites et les arcs de cercle, ou entre deux courbes. En modélisme ils ont un intérêt pour les voies ferrées sur lesquelles circulent des trains, mais sur la route ils n´apportent rien à votre oeuvre puisqu´en modélisme nos véhicules sont immobiles ou très lents. On s´en passera. Il faut quand même faire attention au coup d´oeil. Une “longue” ligne droite qui se termine sans transition par un cercle peut faire un drôle d´effet selon l´environnement. Ici , le coup d´oeil est agréable et on a peut-être suivi un âne pour tracer la route.
Comme pour les voies ferrées, on n´enchaîne jamais deux courbes de sens contraire. il faut un morceau de ligne droite entre les deux. Sa longueur doit permettre au conducteur de sortir correctement du virage précédent avant de se préparer à prendre le suivant. Une route publique n´est pas un circuit de karting. On peut voir que sur cette route sinueuse, le petit alignement droit entre les courbes y est. Même dans les vignes on fait attention à ça. Pour les spécialistes du détail remarquer, au premier plan, la “patte d´oie” et le gravillon qui reste, là où les roues ne passent pas souvent.
1. Surlargeur
Dans un virage, il faut prévoir un supplément de largeur (surlargeur) destiné à faciliter le croisement des véhicules. Sans cela le croisement pourrait y être impossible ou même certains gros véhicules ne pourraient pas passer.
Ici une route de montagne où — si l´on regarde bien — on voit la route s´élargir juste au début de la courbe.
Le parking à l´extérieur du virage n´est pas fait pour augmenter la largeur de la route, mais il est toujours le bienvenu, et pas seulement pour les touristes qui veulent admirer le paysage, mais pour servir de garage en cas de difficulté (voir le paragraphe profil en long).
Ici une copie d´écran de Géoportail en 3D. Route nationale 85 (route Napoléon), au sud de La Mure (38). La définition du relief n´est pas assez fine pour qu´on puisse bien apprécier les détails. L´impression de point bas est une illusion. La route a la même pente avant et après le virage. Celui-là se prend en descente à moins de 20 quand n´y passe pas très souvent. Le rayon dans l´axe est environ 1,5 à 2 fois la largeur de la chaussée, soit 10 à 20 m. Quand il y en avait un, le chemin de fer (à voie métrique) qui suivait le même itinéraire passait à plusieurs kilomètres.
On voit la surlargeur importante. Les semi-remorques et les cars en ont besoin. A cet endroit, ils occupent pourtant toute la route en bloquant la circulation dans l´autre sens. La bande la plus sombre à l´extérieur est due aux pneus des roues motrices qui font remonter le bitume à la surface. La partie plus claire à droite est utilisée par l´avant des véhicules les plus longs. La bande de peinture axiale est effacée par la circulation, alors qu´elle est visible avant et après le virage. Il y a quand même un peu de gris clair sous les arbres. C´est un talus rocheux et pas la chaussée.
Autre exemple quelque part dans l´arrière-pays niçois. Dans ces deux cas il s´agit de routes assez “étriquées” c´est-à-dire que la chaussée tient presque toute la largeur disponible en ne laissant que le minimum aux accotements et fossés.
Ci-dessus, on voit une route importante (R.N. 320 au-dessus de l´entrée nord du tunnel du Puymorens) où l´on a mis les moyens pour avoir de la place sur les côtés, mais la variation de largeur entre les bandes de peintures suit le même principe.
Théorie : Il existe une formule empirique pour calculer cette surlargeur : 50/R où R est le rayon de la courbe dans l´axe. Tout est exprimé en mètres. On ne l´applique pas aux virages de plus de 200 m de rayon.
En montagne, elle est même souvent insuffisante. La surlargeur peut aller jusqu´à 25/R. Les valeurs intermédiaires sont évidemment permises.
Comme on aime bien les montagnes dans les décors des réseaux, voici un exemple d´épingle à cheveux avec la formule 50/R. Ça donne un aspect déjà intéressant.
Sur le schéma, seule la chaussée est représentée. Il ne prétend pas représenter la route de l´une des photos. Le principe théorique donne une surlargeur bien inférieure à celle de la photo de la R.N.  85.
Le point S représente le sommet (rien à voir avec le sommet d´une côte) de la courbe, c´est-à-dire le milieu de l´arc de cercle.
Le rayon est de 20 m et la surlargeur, c´est-à-dire la largeur à ajouter à la largeur de la route en ligne droite, est de 50 divisé par 20 soit 2,5 m à répartir de chaque côté. Comme, dans l´exemple, la route fait 6 m de large, le rayon intérieur de la chaussée fait donc 20 — (6/2) - (2,5/2) = 15,75 m et le rayon extérieur 20 + (6/2) + (2,5/2) = 24,25 m.
Il en découle que les bords de la chaussée en ligne droite et en virage ne tombent plus en face les uns des autres. Il faut faire des raccordements. La longueur de 10 m pour ces raccordements est courte. Dans la réalité, il feraient plutôt 30 ou 50 m, mais on fait avec la place qu´on a. Remarque valable sur les vraies routes et encore plus sur les maquettes. Un raccordement assez court met mieux en évidence la surlargeur. Ce n´est pas la peine de se casser les méninges si personne ne s´en aperçoit.
Vous pouvez ne pas avoir assez de place pour représenter ça et faire plus petit avec un rayon de 10 m. Ne lui attribuez pas le statut de route, mais de chemin de montagne, faites une chaussée de 3 m de large, n´y mettez pas de revêtement plus luxueux qu´un gravillonnage. Un simple empierrement convient aussi. Pas de camion dessus et faites-y des ornières avec un bourrelet au milieu. Et pourquoi pas des nids de poule ? Là, ça fera vrai. C´est le genre de route où on doit faire une manoeuvre avec une voiture de taille moyenne. Y en a.
N.-B. — Ornière sur une route et ornière sur un terrain mou ne donnent pas le même résultat. Dans le cas d´une route, revêtue ou pas, il s´agit de sillons aux bords arrondis.


La suite...
Gérard
Bianchi,
Janvier 2008
Les schémas et photos sont D.R. ou © G. Bianchi pour Ptitrain.
À propos de Ptitrain. — Directeur de la publication : Christophe Franchini.
Rédacteur en chef : Jean-Denis Rondinet. — Rédacteur : Éric le Suisse.
07/04/2008 16:01