Commander les aiguillages (1)
La “décharge capacitive”
Un cheveu de cuivre, le plus fin des fils, capable de commander un gourmand moteur (1) d´aiguille ? Et, un jour, seize aiguilles sur ce même cheveu ? Voilà les principes sur lesquels nous allons baser la commande de nos aiguillages : économie, décentralisation, adaptation à la télécommande “T.T.T.”, ou au micro-ordinateur, voire à des commandes sans bouton du tout (genre commande d´ascenseurs : on pose le doigt et hop !)... Ça ne pose aucun problème : c´est même “trivial”, comme disent les scientifiques ! Et les solutions courent les rues — je n´ai rien inventé :¬)))
(1) Par le mot “moteur”, entendons les bobinages à électro-aimants des matériels ordinaires du commerce (Märklin, Roco, Fleischmann, Jouef, Peco...) et non les “véritables” moteurs lents genre Tortoise, Lemaco, Fulgurex ou les formidables moteurs à fil à mémoire...

Si vous aimez les beaux schémas et les gens qui expliquent simplement, je vous conseille le site “incontournable” de ROB PAISLEY, sur ce sujet et sur beaucoup d´autres ; c´est canadien, hélas en anglais, mais indispensable quand même ! Rassurez-vous : Ptitrain a commencé la traduction de ce site !
Stocker de l´énergie pour :
— la décentraliser (finis, les gros fils véhiculant 6 ampères),
— économiser sur le transformateur d´alimentation (finis, les transfos 6 ampères) ;
— et sur les boutons-poussoirs à dix euros !
Étouffer les étincelles qu´un bobinage engendre lors de son travail.
1. Stocker de l´énergie
Connu depuis la plus haute antiquité ferroviaire sous le nom de “commande d´aiguillage à décharge capacitive” et vendu entre 7 et 30 euros selon les sources, le montage consiste à utiliser un condensateur de forte capacité pour emmagasiner de l´énergie et la restituer sur commande — un peu comme une batterie, mais avec des temps de réponse plus rapides.
     Soit un transfo de train électrique normal, même de faible puissance, utilisé pour sa sortie “accessoires”, c´est-à-dire 12 à 16 volts alternatifs (2). Une résistance R est là pour limiter le courant que devra fournir le transfo. Une diode D1 (qui ne laisse passer le courant que dans un sens) “redressse” l´alternatif et en fait du continu. Un condensateur C se charge de stocker ce courant continu. Dix secondes après le branchement sur le secteur, ce montage ne consomme plus rien.
(2) Important : il est évident que les transfos achetés en vrac (sans boîtier isolé, sans fusible...) dans le commerce électronique sont prodigieusement moins chers que les transfos estampillés “trains”. Mais les normes européennes CE sont si strictes sur la sécurité que Ptitrain ne peut pas officiellement évoquer ce procédé. Si vous habitez l´Europe, vous devrez expérimenter cette possibilité hasardeuse à vos risques et périls et sans que nous soyons tenus pour responsables. Nous nierons avoir eu connaissance de vos activités !!! Après avoir lu cette mise en gare, rendez-vous sur notre page “Techno facile : les transfos
Quand on appuie sur le bouton poussoir B, c´est le condensateur et non le transfo qui fournit les nombreux ampères que les moteurs d´aiguille consomment (3). Les seuls fils qui doivent être épais sont ceux entre C et le moteur, représentés ici en bleu (le reste pourra circuler dans une nappe de fils très fins). Les autres fils véhiculent autant que pour deux petites ampoules d´éclairage, soit très peu. Si l´on appuie trop longtemps sur B, rien ne s´abîme : C s´est vidé, R limite le courant à une valeur faible. Notez que le bouton-poussoir se trouve lui aussi près de l´aiguille (on veillera plus tard à le “recentraliser”, en améliorant le schéma...).
(3) Un moteur Peco ancienne formule consomme environ 2 ampères. C´est un record, tous les autres moteurs consomment moins : 0,65 A pour les Roco classiques (voie code 100), 0,33 A pour Jouef, 0,42 A pour du Märklin Mini-Club...
Un condensateur (“décentralisé”, et que je vais pouvoir le camoufler dans le décor) peut engranger assez d´énergie pour actionner simultanément deux moteurs Peco H0. Dix secondes maxi sont nécessaires à sa recharge (3). Si l´on a plus de moteurs (dans le cas d´itinéraires complexes), on prend un condensateur de plus grosse capacité ou bien on met plusieurs condensateurs en parallèle.
(3) Temps négligeable sur un réseau actionné par la main de l´homme, un module réaliste, etc. Pour une installation complexe, des circulations nombreuses et robotisées, R et D1 devront être remplacés par de l´électronique active : la recharge de C deviendra instantanée.
Nos essais ont eu lieu dans les pires conditions, avec deux moteurs Peco actionnés ensemble grâce aux composants suivants :
C condensateur 4700 microfarads, 40 volts (important : valeur minimale !)
R 390 ohms, 2 watts
D D1 : diode 1N4007, ou autre de la série 1N4000
BP bouton poussoir"spécial train"
transfo "ferroviaire"
C´est la solution “forte”, à 4 ampères. On ne tentera pas de commander une charge plus forte, le prix du condensateur devenant non négligeable (3 à 5 euros). Dans la réalité, il serait raisonnable d´acheter uniquement des condensateurs de 2200 microfarads, qui feront l´affaire pour presque tous les moteurs modernes, sachant qu´on peut en placer deux en parallèle pour retrouver la “pêche” d´un 4700.
2. Étouffer l´étincelle
Un moteur d´aiguille est un bobinage : d´une certaine manière, il stocke lui aussi de l´énergie et l´étincelle aux bornes de l´interrupteur B, c´est du courant que le bobinage tente de renvoyer dans le circuit quand ce circuit s´ouvre (ne m´en demandez pas plus, s´il vous plaît  mais pensez à la bobine d´allumage de votre moteur de voiture qui est chargée de fournir des étincelles aux bougies !).
Si l´on installe entre les deux fils du moteur une deuxième diode, le courant va se dissiper dans cette diode au lieu d´aller abîmer notre bouton-poussoir. Sa durée de vie sera considérablement allongée. Si nous commandons par contact I.L.S., par électronique, par P.C..., cette diode devient même indispensable.
Mêmes composants, mais bouton-poussoir standard.
3. Schéma complet
Et si on faisait un schéma intégral de la commande d´un moteur ? Soit, par exemple, un moteur Peco, avec ses deux enroulements et quatre bornes (dont deux communes, à souder ensemble). Quand on active le bobinage représenté ici en rouge, le moteur pousse vers l´avant la tringle de commande (flèche rouge), ce qui amène l´aiguille en position courbe.

J´appelle “courbe” l´enroulement qui entraîne l´aiguille dans la position courbe (on dit aussi “déviée””) ; et “direct” le bobinage (ici vert) dont l´excitation entraîne l´aiguille en position directe.
Et le bouton-poussoir qui entraîne l´aiguille en position courbe je l´appelle Bc (bouton, courbe), l´autre Bd (bouton, direct). Chacun de deux enroulements possède sa propre diode “étouffe-étincelle” ; une troisième diode, D3, a donc été ajoutée. 
À suivre... Jidé
15.06.2007
Ptitrain, l´e-magazine du train éclectique. — Directeur de la publication : Christophe Franchini.
Rédacteur en chef : Jean-Denis Rondinet